Histoire

Les bactériocines sont de petits peptides produits par les ribosomes et dotés de propriétés antimicrobiennes. Elles sont typiquement décrites comme ayant une spécificité très étroite, ciblant souvent des espèces ou des souches bactériennes apparentées. Certaines bactériocines ont un large spectre d’activité, comme nous l’avons observé en accord avec la littérature. Ces molécules ont un grand potentiel pour des applications industrielles.

La vidéo ci-dessous illustre comment les bactériocines peuvent affecter la croissance bactérienne. La vidéo du haut montre une croissance normale d’E. coli (deux heures de croissance en milieu LB suivies de huit heures dans une solution SANS bactériocines). La vidéo du bas montre la croissance d’E. coli dans les mêmes conditions, mais dans une solution AVEC bactériocines. (microscopie à écoulement temporel combinée au dispositif microfluidique du laboratoire de microbiologie cellulaire et moléculaire de l’ULB)

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Histoire

L’histoire des bactériocines commence avec le scientifique belge André Gratia. En 1925, comme premier résultat d’une recherche de bactéries ayant des propriétés antimicrobiennes, Gratia a décrit l’activité de la colicine, la première bactériocine connue. Cette découverte s’est produite en même temps que la description de l’antibiotique pénicilline par Alexander Fleming en 1928 et les observations indépendantes de l’activité des bactériophages par Frederick Twort en 1915 et Félix d’Hérelle en 1917.

Les bactériocines n’ont pas reçu le même niveau d’attention que les antibiotiques, car un manque de compréhension de leur biologie a entraîné des difficultés dans leur production et une faible cohérence dans le contrôle de la croissance microbienne. Cela a conduit à la prédominance des antibiotiques à large spectre synthétisés chimiquement pendant le reste du 20e siècle jusqu’à aujourd’hui. Des problèmes similaires ont été observés avec les bactériophages, bien qu’ils aient trouvé une utilisation médicale étendue dans le pays de la Géorgie grâce aux travaux de d’Hérélle et George Eliava, ainsi qu’en Russie et en Pologne L’utilisation des bactériophages dans l’industrie laitière a également été commercialisée aux États-Unis et aux Pays-Bas.

Actuellement, l’utilisation des bactériocines est le plus souvent associée à l’industrie alimentaire. De nombreuses bactériocines sont produites par des espèces à Gram positif, en particulier des bactéries productrices d’acide lactique telles que Lactoccocus sp. La nisine est la plus largement utilisée de ces bactériocines, agissant comme un conservateur alimentaire, et a le statut GRAS (généralement reconnu comme sûr) de la FDA et est approuvé comme conservateur (additif alimentaire) dans l’Union européenne (E234).

Résistance antimicrobienne (AMR)

L’émergence de la résistance antimicrobienne (AMR) a de grandes implications négatives pour la santé humaine. La réduction de l’utilisation des antibiotiques dans les applications médicales et industrielles devrait être un objectif commun pour réduire la quantité d’antibiotiques libérés dans l’environnement. Les bactériocines offrent une approche prometteuse pour résoudre ce problème. En outre, éviter l’utilisation d’antibiotiques dans les applications industrielles des biofermenteurs peut réduire les coûts de production et aider à concentrer la production métabolique sur la production.

Nouveaux développements dans la recherche académique

Les bactériocines sont également connues pour jouer un rôle dans la communication et l’écologie bactériennes. Par exemple, l’intestin et la cavité buccale sont des parties du corps humain qui accueillent des milliers d’espèces bactériennes différentes. Ces bactéries, souvent bénéfiques pour la santé humaine, sont continuellement dans un environnement stressant et sont en compétition pour la nourriture et l’espace. Lorsqu’il était chercheur dans le laboratoire du professeur Pascal Hols (UCL/LIBST), le Dr Johann Mignolet (aujourd’hui chef de projet R&D de Syngulon) a démontré que Streptococcus salivarius, une bactérie intestinale humaine commensale, utilise une phéromone de communication pour déclencher concomitamment deux réponses : la capacité de modifier son génome par l’acquisition d’ADN « étranger » et la production de puissantes bactériocines. Ces toxines ou variants non transformables de S. Salivarius pourraient être utilisés à des fins médicales pour tuer les superbactéries multirésistantes nuisibles telles que Staphylococcus aureus et plusieurs streptocoques (Mignolet et al 2018 ; PMID : 29444418 ; DOI : 10.1016/j.celrep.2018.01.055).

Cette figure adaptée de Mignolet et al, 2018, montre les différentes cascades transcriptionnelles qui déclenchent l’entrée en compétence et l’expression des gènes codant pour les bactériocines dans quatre modèles de streptocoques différents : S. salivarius, S. thermophilus, S. mutans et pneumoniae. Il est particulièrement intéressant de constater que le système de régulation des bactériocines BlpRH/BlpC est absent ou incomplet chez S. Salivarius. Les cases indiquent les systèmes partagés entre les espèces. Les grandes flèches continues représentent le contrôle transcriptionnel, et les flèches en pointillés la traduction des protéines. Les petites flèches continues indiquent le mouvement des protéines/peptides/phosphates.

Le test de destruction des bactéries ci-dessous démontre l’ajout d’une phéromone induisant la production de bactériocine, ce qui entraîne un effet inhibiteur sur les bactéries environnantes.

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