Lésions de Dieulafoy et malformations artério-veineuses
Lésions de Dieulafoy et malformations artério-veineuses
I. Ce que tout médecin doit savoir.
Les lésions de Dieulafoy (figure 1) sont de grandes artérioles tortueuses de l’estomac qui provoquent entre 1 et 5,8 % de tous les saignements gastro-intestinaux supérieurs. Elles ont été initialement découvertes en 1898 par le chirurgien français Paul Georges Dieulafoy. Ces lésions saignent rapidement et les patients peuvent présenter un choc hémorragique. L’artériole est proche de la muqueuse de l’estomac et ne se ramifie pas en capillaires comme la plupart des vaisseaux. L’artériole peut, en substance, » sauter » à travers la muqueuse et saigner spontanément, puis retourner dans la sous-muqueuse. Histologiquement, ces vaisseaux ne présentent pas d’ulcérations ni de vasculite. Soixante-quinze pour cent de ces lésions apparaissent au niveau de la petite courbure de l’estomac à moins de 6 centimètres (cm) de la jonction gastro-œsophagienne, mais ces lésions apparaissent également dans le duodénum, le côlon, les anastomoses chirurgicales et l’œsophage.
Il existe une maladie génétique qui peut provoquer de multiples malformations artério-veineuses (MAV) appelée syndrome d’Osler-Weber-Rendu. Il s’agit d’une maladie héréditaire dans laquelle les MAV peuvent se produire dans plusieurs régions du corps, y compris le tractus gastro-intestinal (GI). Lorsqu’un saignement se produit, les options thérapeutiques pour les lésions de Dieulafoy s’appliquent également aux personnes atteintes du syndrome d’Osler-Weber-Rendu.
II. Confirmation du diagnostic : Êtes-vous sûr que votre patient a des lésions de Dieulafoy et des malformations artério-veineuses ?
Typiquement, la seule façon de diagnostiquer cette condition est de faire une endoscopie et de visualiser le vaisseau qui saigne et/ou de faire une angiographie lorsqu’il saigne activement.
A. Antécédents Partie 1 : Reconnaissance des schémas:
Les principaux symptômes sont un choc hémorragique, une anémie et une hématémèse récurrente avec ou sans méléna.
B. Historique Partie 2 : Prévalence :
Les lésions ont été citées comme ayant une prévalence de 1 à 14% pour l’ensemble des saignements digestifs supérieurs. Il n’y a pas d’association avec les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ou la consommation d’alcool comme de nombreuses autres causes d’hémorragies digestives hautes. Elle est deux fois plus susceptible de se produire chez les hommes et l’âge médian est de 54 ans. Les patients présentent généralement plusieurs comorbidités.
C. Antécédents Partie 3 : Diagnostics concurrents pouvant mimer les lésions de Dieulafoy et les malformations artério-veineuses
La plupart des autres causes d’hémorragie digestive haute peuvent mimer ce processus, notamment les varices, les ulcères, le cancer du système digestif supérieur, la gastrite, la coagulopathie et l’épistaxis.
D. Résultats de l’examen physique.
Les signes vitaux peuvent être stables ou instables et le patient peut se présenter avec une pâleur due à l’anémie et, à l’occasion, une douleur de l’abdomen supérieur, ou il peut avoir un examen physique bénin. Si le patient est atteint du syndrome d’Osler-Weber-Rendu, alors il peut avoir des télangiectasies et/ou des taches de vin de Porto ailleurs sur le corps.
E. Quels sont les tests diagnostiques à effectuer?
Typiquement, ces patients doivent subir une numération formule sanguine complète (NFS), type et dépistage, et des études de coagulation. L’étalon-or pour établir le diagnostic est l’endoscopie.
Quelles études de laboratoire (le cas échéant) doivent être commandées pour aider à établir le diagnostic ? Comment les résultats doivent-ils être interprétés ?
Une numération sanguine et un dépistage de type doivent toujours être effectués pour s’assurer que le patient n’a pas besoin d’une transfusion. De plus, un test de coagulation doit être effectué et s’il y a une coagulopathie, elle doit être inversée avec de la vitamine K, du plasma frais congelé ou les deux.
Quelles études d’imagerie (le cas échéant) doivent être demandées pour aider à établir le diagnostic ? Comment les résultats doivent-ils être interprétés?
Une angiographie peut être réalisée lorsque l’endoscopie initiale ne permet pas de visualiser le vaisseau. L’angiographie peut aider à déterminer la source du saignement surtout lorsqu’il se trouve dans un endroit rare.
F. Tests diagnostiques surutilisés ou « gaspillés » associés à ce diagnostic.
Un mal nécessaire en termes de tests supplémentaires serait la répétition des endoscopies. Comme ces lésions sont difficiles à repérer mais ont un taux de guérison élevé par endoscopie, des endoscopies répétées sont parfois nécessaires pour visualiser le vaisseau et assurer l’hémostase. Des endoscopies répétées sont nécessaires chez jusqu’à 6 % des patients. En outre, la vidéocapsule endoscopique et l’entéroscopie à double ballon peuvent être utilisées pour les lésions situées plus bas dans le tube digestif pour les patients présentant un méléna récurrent, en particulier pour les patients stables en ambulatoire.
III. Prise en charge par défaut.
La prise en charge par défaut commence comme pour toutes les hémorragies digestives hautes : sécurisation des voies aériennes si nécessaire, réanimation et stabilisation avec des fluides intraveineux (IV), et transfusion sanguine si nécessaire. En outre, des perfusions d’inhibiteurs de la pompe à protons doivent être commencées pour abaisser le potentiel hydrogène (pH) gastrique.
A. Prise en charge immédiate.
La prise en charge immédiate comprend la prise des signes vitaux, les tests de NFS en série, le profil métabolique complet, les tests de coagulation et le type et le dépistage. Un endoscopiste doit être consulté dès que possible pour une endoscopie. De nombreuses interventions endoscopiques peuvent être réalisées, notamment le cerclage, le clippage, l’injection d’épinéphrine, l’électrocoagulation au plasma argon et la photocoagulation. La prise en charge initiale a un taux de réussite de 85 % et des endoscopies répétées peuvent être nécessaires pour obtenir l’hémostase. L’étape suivante sera l’angiographie et éventuellement l’embolisation. La chirurgie est le dernier recours pour un traitement curatif. Dans moins de 5% des cas, un chirurgien devra être consulté pour réséquer la partie de l’estomac qui saigne.
B. Conseils d’examen physique pour guider la prise en charge.
Typiquement, il n’y a pas de résultats d’examen physique à suivre pour rechercher un nouveau saignement en dehors des signes vitaux. Le patient produira probablement des selles mélaniques pendant les prochains jours. Dans de rares cas, le patient peut avoir un re-saignement sévère provoquant une hématémèse massive.
C. Tests de laboratoire pour surveiller la réponse à la prise en charge et les ajustements de celle-ci.
La numération formule sanguine ou l’hémoglobine et l’hématocrite doivent être suivis pendant au moins les 24 premières heures car ils aideront probablement à la prise en charge des transfusions. Il faut se rappeler que l’hémoglobine est généralement en retard sur le saignement, de sorte que l’hémoglobine initiale pourrait ne pas être une représentation exacte de la perte de sang à la fois pendant un saignement vif et après avoir eu un saignement arrêté.
D. Gestion à long terme.
Bien que l’hémostase ait un taux de guérison élevé, certaines études citent des taux de mortalité à 30 jours aussi élevés que 13 % et à 17 mois aussi élevés que 42 %. Les patients doivent donc être suivis par un endoscopiste et minimiser leurs facteurs de risque de récidive d’hémorragie digestive haute. Ils doivent notamment éviter les AINS et l’alcool, et éventuellement prendre des médicaments antiacides tels que les inhibiteurs des récepteurs de l’histamine 2 (H2) et les inhibiteurs de la pompe à protons.
F. Pièges courants et effets secondaires de la prise en charge
Les pièges courants incluent les endoscopistes qui confondent une gastrite et/ou des ulcères concomitants avec le saignement sentinelle.
Les patients sont généralement placés sous perfusion d’inhibiteurs de la pompe à protons, suivie d’une perfusion continue à 8 milligrammes (mg) par heure, généralement jusqu’à 72 heures.
IV. Prise en charge avec comorbidités
La desmopressine peut être utilisée pour assurer une hémostase temporaire chez un patient hémorragique urémique.
B. Insuffisance hépatique.
Les personnes atteintes d’une maladie hépatique intrinsèque auront probablement besoin de plasma frais congelé (PFC) ou de vitamine K pour aider à inverser leur coagulopathie afin de ralentir le saignement.
C. Insuffisance cardiaque systolique et diastolique
Chez les patients souffrant d’insuffisance cardiaque grave, il faudra surveiller leur état d’oxygénation ainsi que leur état volumique pour s’assurer qu’ils ne deviennent pas hypoxiques pendant qu’ils sont réanimés.
D. Maladie coronarienne ou maladie vasculaire périphérique
Le bénéfice de la conservation des antiplaquettaires devra être mis en balance avec le risque de syndromes coronariens aigus. En outre, on pourrait avoir un seuil plus bas dans la transfusion de sang chez les patients ayant une maladie coronarienne active.
E. Diabète ou autres problèmes endocriniens
Pas de changement dans la gestion standard.
F. Malignité
Pas de changement dans la gestion standard.
G. Immunosuppression (VIH, stéroïdes chroniques, etc.).
Pas de changement dans la gestion standard.
H. Maladie pulmonaire primaire (BPCO, asthme, ILD)
Pas de changement dans la prise en charge standard.
I. Problèmes gastro-intestinaux ou nutritionnels
Si le patient est appauvri sur le plan nutritionnel, un supplément de vitamine K pourrait devoir être administré.
J. Problèmes hématologiques ou de coagulation
La coagulopathie du patient devra être inversée avec de la vitamine K et ou du plasma frais congelé. Chez un patient anticoagulé avec un nouvel anticoagulant (NOAC), les soins de soutien sont les meilleurs. Dans le cas d’un patient sous dabigatran (Pradaxa®), l’idarucizumab (Praxbind®), un fragment d’anticorps a récemment été approuvé aux États-Unis pour la réversion.
K. Démence ou maladie psychiatrique/Traitement
Aucune modification de la prise en charge standard.
A. Considérations relatives à la sortie pendant l’hospitalisation.
On doit signer une sortie pour des tests de NFS en série pendant au moins les 24 premières heures avec des paramètres de transfusion.
B. Durée anticipée du séjour.
La plupart des patients présentant une lésion de Dieulafoy non compliquée doivent prévoir de rester au moins 2 à 3 jours.
C. Quand le patient est-il prêt à quitter l’hôpital.
Lorsque le patient est hémodynamiquement stable et n’a pas eu de saignement actif depuis au moins 24 heures, et qu’il est capable de tolérer au moins un régime liquide complet.
D. Organisation du suivi clinique
L’organisation d’un suivi étroit est primordiale pour ces patients.
Quand faut-il organiser le suivi clinique et avec qui.
Les patients doivent effectuer un suivi avec leur gastroentérologue ainsi qu’avec leur médecin traitant.
Quels tests doivent être effectués avant la sortie de l’hôpital pour permettre la meilleure première visite en clinique.
Une NFS devrait être effectuée le jour de la sortie de l’hôpital pour documenter l’hématocrite stabilisé du patient.
Quels tests devraient être commandés en tant que patient externe avant ou le jour de la visite à la clinique.
Une répétition de la NFS pourrait être commandée ; cependant, un suivi étroit des symptômes cliniques est plus important.
E. Considérations sur le placement.
Non
F. Pronostic et conseil aux patients.
Les patients ont un taux de guérison d’au moins 85 % après l’endoscopie initiale, mais il faut leur conseiller de revenir immédiatement aux urgences en cas de nouvelle hémorragie digestive haute.
A. Normes et documentation des indicateurs de base.
Non
B. Prophylaxie appropriée et autres mesures pour prévenir la réadmission.
Dispositifs de compression séquentielle pour la prophylaxie de la thrombose veineuse profonde (TVP).
VII. Quelles sont les preuves ?
Baxter, M, EH Aly, EH. « Lésion de Dieulafoy : tendances actuelles dans le diagnostic et la gestion ». Ann R Coll Surg Engl. vol. 92. 2010. pp. 548-554.
Lara. « Lésions de Dieulafoy du tube digestif : localisation et résultats thérapeutiques ». Dig Dis Sci. vol. 55. 2010. pp. 3436-41.
Joarder, Al. « La lésion de Dieulafoy : un aperçu ». Mymensingh Med J. vol. 23. 2014. pp. 186-94.
Nguyen, DC, Jackson, CS. » La lésion de Dieulafoy : Une mise à jour sur l’évaluation, le diagnostic et la gestion « . Journal de la gastroentérologie clinique. vol. 49. 2015. pp. 541-549.
Maeda, Y. « La vidéo-capsule endoscopique comme examen initial pour les saignements gastro-intestinaux obscurs manifestes peut identifier efficacement les patients qui nécessitent une entéroscopie à double ballon ». BMC Gastroenterology. vol. 15. 2015.
Pollack, CV. « Idarucizumab pour l’inversion du traitement par le Dabigatran ». NEJM. vol. 373. 2015. pp. 511-520.
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