Discours indirect libre

Roy Pascal cite Goethe et Jane Austen comme les premiers romanciers à utiliser ce style de façon constante.Il affirme que le romancier français du XIXe siècle, Flaubert, a été le premier à être conscient de ce style. Ce style, appelé en français discours indirect libre, sera largement imité par les auteurs ultérieurs. Il est également connu sous le nom d’estilo indirecto libre en espagnol, et est souvent utilisé par l’écrivain latino-américain Horacio Quiroga.

Dans la littérature allemande, le style, connu sous le nom de erlebte Rede (discours expérimenté), est peut-être le plus célèbre dans les œuvres de Franz Kafka, brouillant les expériences à la première personne du sujet avec une perspective narrative grammaticalement à la troisième personne.

Dans la littérature danoise, le style est attesté depuis Leonora Christina (1621-1698) (et est, en dehors de la littérature, encore aujourd’hui courant dans le parler danois familier).

Certains des premiers exemples soutenus de discours indirect libre dans la littérature occidentale se trouvent dans la littérature latine, où le phénomène prend souvent le nom d’oratio obliqua. Il est caractéristique, par exemple, du style de Jules César, mais on le retrouve également dans l’œuvre historique de Tite-Live.

Littérature anglaise, irlandaise et écossaiseEdit

Comme indiqué plus haut, Austen en fut l’une des premières praticiennes. La romancière américaine Edith Wharton s’appuie largement sur cette technique dans son roman La maison de la hirondelle, paru en 1905. L’auteur irlandais James Joyce a également utilisé le discours indirect libre dans des œuvres telles que « The Dead » (dans Dubliners), A Portrait of the Artist as a Young Man, et Ulysse. L’auteur écossais James Kelman utilise abondamment ce style, notamment dans son roman How Late It Was, How Late, qui a remporté le Booker Prize, mais aussi dans nombre de ses nouvelles et certains de ses romans, dont la plupart sont rédigés dans le style du Glaswegian. Virginia Woolf, dans ses romans To the Lighthouse et Mrs Dalloway, s’appuie fréquemment sur le discours indirect libre pour nous faire pénétrer dans l’esprit de ses personnages. Un autre moderniste, D. H. Lawrence, utilise aussi fréquemment le style indirect libre pour « transcrire des pensées non exprimées ou même incomplètement verbalisées ». Lawrence utilise le plus souvent le discours indirect libre, une technique littéraire qui décrit les pensées intérieures des personnages en utilisant les pronoms de la troisième personne du singulier ( » il  » et  » elle « ) dans L’Arc-en-ciel et Les Femmes amoureuses. Selon Charles Rzepka de l’université de Boston, la maîtrise du discours indirect libre d’Elmore Leonard « est inégalée à notre époque, et parmi les plus sûres de tous les temps, même si l’on inclut Jane Austen, Gustave Flaubert et Hemingway dans le mélange. »

Certains soutiennent que le discours indirect libre a également été utilisé par Chaucer dans Les Contes de Canterbury. Lorsque le narrateur dit dans « Le prologue général » qu’il est d’accord avec l’opinion du moine rejetant les critiques sur son mode de vie très peu monastique, il est apparemment en train de paraphraser le moine lui-même:

And I seyde his opinion was good : Quoi ! doit-il étudier, et se faire du bois, sur un livre dans un cloître, toujours à poure ? Ou bien travailler avec ses mains, comme Austin Bit ? Comment le monde sera-t-il servi ? Laissons Austin se réserver sa poire !

Ces questions rhétoriques peuvent être considérées comme la manière désinvolte du moine d’écarter les critiques sur son style de vie aristocratique. Des exemples similaires peuvent être trouvés dans le portrait du frère par le narrateur.

Littérature latineEdit

Certains des premiers exemples soutenus de discours indirect libre dans la littérature occidentale se produisent dans la littérature latine, où le phénomène prend conventionnellement le nom d’oratio obliqua. Il est caractéristique, par exemple, du style de Jules César, mais on le trouve aussi dans l’œuvre historique de Tite-Live. Un exemple tiré du De bello Gallico de César avec le début de la réponse du roi allemand Ariovistus à César (1.36):

Ad haec Ariouistus respondit ius esse belli ut qui uicissent iis quos uicissent quemadmodum uellent imperarent ; item populus Romanus uictis non ad alterius praescriptum, sed ad suum arbitrium imperare consuesse. Si ipse populo Romano non praescriberet quemadmodum suo iure uteretur, non oportere se a populo Romano in suo iure impediri. Haeduos sibi, quoniam belli fortunam temptassent et armis congressi ac superati essent, stipendiarios esse factos. A cela Arioviste répondit que le droit de la guerre est que les vainqueurs gouvernent les vaincus de la manière qui leur plaît ; de même le peuple romain avait l’habitude de gouverner les vaincus non pas sur l’ordre d’un autre, mais selon sa propre volonté. S’il ne dictait pas aux Romains l’usage qu’ils devaient faire de leurs droits, il ne devait pas être gêné par les Romains dans l’usage des siens. Il avait fait des vassaux des Haedui, parce qu’ils avaient tenté leur chance à la guerre et qu’ils avaient été rencontrés en armes et vaincus.

Suivant les règles de l’oratio obliqua, tous les verbes et pronoms passent à la troisième personne, représentant les paroles (ou parfois les pensées non exprimées) d’un individu de manière longue et articulée, au-delà des limites du discours indirect étroitement voulu, mais néanmoins sans citation textuelle. Cela permet à l’historien de rapporter les discours de divers personnages de façon assez détaillée sans jamais renoncer à son rôle de narrateur, tout en évitant l’effet rhétorique que l’historiographie antique associait au discours direct prolongé.

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