Déontologie
I. Définition
La déontologie est une école de philosophie morale dans laquelle le comportement éthique équivaut à suivre des règles. Les déontologues croient que le but de la philosophie morale devrait être de déterminer les « règles » pour vivre une vie morale et qu’une fois que les gens connaissent ces règles, ils devraient les suivre. « La règle d’or » (faites aux autres ce que vous voudriez qu’ils vous fassent) est un exemple de déontologie ; c’est une règle morale censée être suivie dans toutes les situations, pour que tout le monde vive moralement.
En général, le but de la déontologie est de créer un ensemble rationnel de règles, mais ce n’est pas toujours le cas. Certaines personnes fondent leur déontologie sur la foi plutôt que sur la rationalité.
II. Types de déontologie
Les gens pensent souvent que la déontologie est une école de pensée rigide ou absolutiste, mais en fait, ce n’est pas nécessairement vrai non plus. En fait, la déontologie peut être soit universelle, soit relative :
a. Universalisme déontologique
Les règles s’appliquent à tout le monde, en toutes circonstances.
Exemple
Si vous êtes hindou, vous pourriez croire qu’il est mauvais de manger du bœuf ; cette règle ferait partie de votre déontologie. Si vous pensiez que c’est mal pour n’importe qui de manger du bœuf, vous seriez un universaliste déontologique.
b. Relativisme déontologique
Les règles s’appliquent aux personnes dans certaines circonstances, ou dans le cadre de certaines traditions.
Exemple
Vous pourriez penser qu’il est mal pour vous, en tant qu’hindou, de manger du bœuf, mais OK pour les non-hindous de manger du bœuf ; vous seriez alors un relativiste déontologique.
L’avantage du relativisme est sa flexibilité ; il permet de vivre plus facilement dans un monde diversifié où d’autres personnes ont des croyances et des pratiques différentes des vôtres. D’un autre côté, certaines personnes estiment qu’il est trop flexible. Elles veulent une philosophie morale plus solide, qui juge du bien et du mal pour tout le monde.
La déontologie peut aussi être religieuse ou laïque :
Religieuse | Séculaire | |
Universaliste | Dieu(x) a/ont déterminé un ensemble de règles pour l’humanité. Ces règles s’appliquent à tout le monde, à tout moment. | La moralité est basée sur un ensemble de règles, mais ces règles ne viennent d’aucun Dieu. Elles proviennent plutôt de la raison, de la compassion ou de la nature. |
Relativiste | Dieu(x) a/ont déterminé un ensemble de règles que les croyants doivent suivre, mais ces mêmes règles ne s’appliquent pas nécessairement à tout le monde dans toutes les situations. | Il existe des règles de comportement, mais elles dépendent de nos circonstances et de notre culture. Ces règles proviennent de la société et non de Dieu, mais elles n’en demeurent pas moins des règles morales importantes. |
III. La déontologie vs le conséquentialisme vs l’éthique de la vertu
La déontologie est habituellement opposée au conséquentialisme et à l’éthique de la vertu, les deux autres branches principales de la philosophie morale occidentale. Ces branches ne sont pas exactement en concurrence ; considérez-les plutôt comme des lentilles différentes se concentrant sur différents aspects de la moralité. Certaines personnes mettent l’accent sur l’une ou l’autre, mais cela ne signifie pas qu’elles nient l’importance des autres.
Déontologie | Conséquentialisme | Éthique des vertus |
La moralité consiste à trouver de bonnes règles. Nous devrions trouver un système de règles pour guider notre comportement et nous y tenir. |
La moralité concerne les résultats. Nous devrions évaluer les résultats les plus probables de nos actions et choisir les actions ayant les meilleurs résultats. |
La moralité concerne les bonnes personnes. Nous devrions travailler à devenir plus honnêtes, compatissants, gentils, courageux, etc. En devenant plus vertueux, nous ferons des choix plus éthiques et n’aurons pas besoin de règles. |
IV. Citations célèbres sur la déontologie
Citation 1
« Fais ce qui est juste, même si le monde périt. » (Proverbe latin)
Ce proverbe est le préféré des déontologues. C’est une forte pomme de discorde avec les conséquentialistes, qui diraient que laisser le monde périr est le contraire de faire ce qui est juste ! Mais pour les déontologues, la moralité n’est pas définie par les conséquences. Une bonne action peut donc avoir des résultats désastreux, mais cela ne change rien au fait que c’était la bonne chose à faire. Les conséquentialistes disent que c’est une philosophie dangereuse car elle permet aux gens de justifier des choses horribles, mais les déontologues répondent que c’est peu probable tant que les règles sont vraies et justes.
Citation 2
« La non-violence conduit à l’éthique la plus élevée, qui est le but de toute évolution. Tant que nous ne cesserons pas de nuire à tous les autres êtres vivants, nous resterons des sauvages. » (Thomas A. Edison)
Thomas Edison était l’inventeur de l’ampoule électrique et de nombreux autres dispositifs (dont plusieurs ont pu être volés à des inventeurs moins célèbres !) Il vivait en Amérique à une époque où l’intérêt pour les religions orientales comme l’hindouisme et le bouddhisme était intense. Les propres croyances éthiques d’Edison étaient fortement influencées par le concept hindou/bouddhiste d’ahimsa, ou de non-violence ; il croyait qu’un engagement à ne pas faire de mal aux autres êtres vivants pouvait conduire à un code de comportement complètement éthique.
V. L’histoire et l’importance de la déontologie
La déontologie a rarement été séparée de l’éthique de la vertu. La plupart des traditions morales et religieuses combinent ces deux approches.
Exemple
Le judaïsme, le christianisme et l’islam croient tous en leurs propres versions des dix commandements, donnés à Moïse par Dieu dans l’Ancien Testament ; il s’agit évidemment d’un système déontologique-un ensemble de règles. Cependant, toutes ces religions soulignent également l’importance de la vertu, exhortant les croyants à développer leur honnêteté, leur générosité et leur compassion.
La déontologie est devenue proéminente au cours du siècle des Lumières, lorsque des penseurs comme Emmanuel Kant ont tenté de développer des systèmes moraux indépendants de la religion. Ces penseurs avaient été témoins de siècles de violence et d’intolérance religieuses en Europe, et beaucoup pensaient qu’il était temps de développer une nouvelle approche de la moralité. Ils n’étaient pas nécessairement anti-chrétiens (bien que certains l’étaient), mais ils étaient tous d’accord pour dire que le christianisme devait être complété par des règles éthiques basées sur la raison plutôt que sur la foi et la tradition.
Ce côté des Lumières était populaire en France et en Allemagne, mais moins en Grande-Bretagne et en Amérique. En Grande-Bretagne et en Amérique, le conséquentialisme dominait – plus précisément, une branche du conséquentialisme appelée utilitarisme, qui se concentre sur la promotion du bonheur maximal pour tous. Mais cela a changé lorsque John Rawls a présenté un argument célèbre dans Une théorie de la justice qui a convaincu de nombreuses personnes d’abandonner l’utilitarisme. Rawls était un kantien qui défendait une version américanisée de la déontologie allemande. Grâce au travail de Rawls, la déontologie laïque est devenue très influente dans les départements de philosophie américains, bien que l’utilitarisme ait encore beaucoup d’adeptes.
VI. La déontologie dans la culture populaire
Exemple 1
Dans Mass Effect, Legion est le nom donné à une ruche-esprit ambulante composée de plus de mille programmes informatiques « geth ». Bien que les geth soient généralement maléfiques, cette ruche-esprit particulière possède une boussole morale basée sur un système de règles. Tous les différents programmes se sont mis d’accord sur un « code de lois » pour leur comportement, et Legion se réfère à ce code lorsqu’il prend des décisions morales.
Exemple 2
Le Code Jedi est un ensemble de règles guidant tous les Jedi dans l’univers Star Wars. Lorsqu’ils s’éloignent de ce Code, les Jedi peuvent être séduits par le côté obscur de la Force. Il comprend des règles comme le contrôle de ses émotions et l’interdiction de nuire aux autres êtres vivants. Les Jedi semblent guider leur comportement autant que possible en fonction de ces règles, ce qui en fait des déontologues.
VII. Controverses
L’impératif catégorique
Dans le domaine de la déontologie, la théorie la plus célèbre est l’impératif catégorique d’Emmanuel Kant. Il s’agit d’une idée complexe et controversée ; elle prétend que nous devrions toujours agir selon les mêmes règles que nous voulons rationnellement que tout le monde suive.
Exemple
Nous ne devrions pas briser de promesses parce que nous ne pouvons pas rationnellement vouloir que tout le monde le fasse ; si tout le monde brisait ses promesses tout le temps, alors toute l’idée d’une promesse n’aurait plus aucun sens ; par conséquent, un monde de promesses brisées est non seulement indésirable mais aussi irrationnel.
L’impératif catégorique a attiré à la fois des adeptes et des critiques au cours des siècles. La principale critique est qu’il ne donne pas de véritables réponses à de nombreuses questions éthiques. Par exemple, que se passe-t-il si quelqu’un dit qu’il veut vivre dans un monde de compétition brutale et violente dans lequel les plus forts sortent vainqueurs et les faibles sont détruits ? C’est le monde que les nazis ont cherché à créer. La plupart des gens disent qu’un tel monde est indésirable, mais il n’est pas facile de prouver qu’il est irrationnel. Que diriez-vous à quelqu’un qui vous dirait que c’est, en fait, le monde qu’il souhaite ? Comment pourrions-nous argumenter contre un nazi en utilisant l’impératif catégorique ? Les critiques disent que si une idée morale ne montre pas en quoi le nazisme est mauvais, alors il y a quelque chose qui cloche dans cette idée.
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