Combien de temps les humains peuvent-ils survivre sans nourriture ni eau ?

2 décembre 2015

par Peter Janiszewski, docteur en médecine.

Rita Chrétien, une Canadienne a survécu en étant bloquée à l’intérieur d’un véhicule dans le Nevada pendant 48 jours, en ne mangeant que du mélange de sentiers et des bonbons, et en buvant l’eau d’un ruisseau. Apparemment, elle et son mari suivaient les instructions de leur GPS pour se rendre à Las Vegas depuis la Colombie-Britannique lorsqu’ils ont emprunté une route rurale qui se transforme en tourbière pendant les mois d’hiver. Leur camionnette a fini par s’enliser dans la boue au milieu de nulle part, et tous deux ont attendu de l’aide pendant trois jours sans voir personne. À ce moment-là, Albert Chrétien, le mari, est parti chercher de l’aide, tandis que Rita est restée dans la camionnette. Lorsqu’elle a été retrouvée par un groupe de chasseurs la semaine dernière, elle était presque morte et avait perdu une trentaine de kilos. Son mari reste à trouver.

Cette histoire récente de famine presque complète met en évidence la capacité humaine à survivre pendant de longues périodes sans subsistance.

En raison de préoccupations éthiques évidentes, il n’y a pas beaucoup de données scientifiques crédibles sur le sujet de la famine et de la survie. Au lieu de cela, il existe de nombreux récits de cas volontaires ou involontaires de famine complète ou quasi complète qui nous permettent de tirer quelques conclusions très générales.

L’un des cas les plus connus de famine volontaire, est la grève de la faim du Mahatma Ganhdi. Pendant sa protestation, Gandhi n’a absolument rien mangé et n’a bu que des gorgées d’eau pendant 21 jours, et il a survécu. Ce qui est extraordinaire dans ce cas, c’est que Gandhi était très maigre lorsqu’il a commencé sa grève de la faim, n’ayant donc pas une grande réserve d’énergie dès le départ. Il faut également noter que durant sa vie, Gandhi aurait effectué un total de 14 grèves de la faim.

Dans un éditorial publié en 1997 dans le British Medical Journal, Peel a brièvement passé en revue la littérature disponible concernant la famine humaine. En général, il semble que les humains peuvent survivre sans aucune nourriture pendant 30 à 40 jours, tant qu’ils sont correctement hydratés. Les symptômes sévères de la famine commencent vers 35-40 jours, et comme l’ont souligné les grévistes de la faim de la prison de Maze à Belfast dans les années 1980, la mort peut survenir vers 45 à 61 jours.

La cause la plus fréquente de décès dans ces cas extrêmes de famine est l’infarctus du myocarde ou la défaillance d’un organe, et on suggère qu’elle survient le plus souvent lorsque l’indice de masse corporelle (IMC) d’une personne atteint environ 12,5 kg/m2.

Bien sûr, on pourrait s’attendre à une variabilité marquée entre 2 individus dans leur capacité à supporter la famine. Comme le suggère un article d’Alan Lieberson dans Scientific American,

La durée de survie sans nourriture est grandement influencée par des facteurs tels que le poids corporel, la variation génétique, d’autres considérations de santé et, surtout, la présence ou l’absence de déshydratation.

J’ajouterais que la composition corporelle jouerait probablement aussi un rôle clé ; pour un même poids corporel, l’individu ayant un plus grand pourcentage de graisse corporelle a un plus grand stockage embarqué de calories. De même, une masse musculaire plus faible serait généralement associée à une consommation calorique réduite. Par extension, cela suggérerait que les femmes pourraient avoir un avantage de survie par rapport aux hommes en raison de leurs plus grandes réserves relatives de graisse.

Le facteur le plus important de tous, cependant, semble être l’hydratation.

Dans l’exemple qui a commencé ce billet, Rita Chrétien a survécu à son épreuve de 48 jours en grande partie grâce à la disponibilité d’un peu de neige fondue pour boire. En effet, si aucune eau n’avait été disponible, Rita n’aurait peut-être pas aussi bien résisté. Dans le cas des personnes hospitalisées qui sont dans un état végétatif persistant et qui sont privées d’alimentation artificielle, la mort survient dans les 10 à 14 jours. Il faut garder à l’esprit que ces personnes sont dans le coma et complètement immobiles, consommant ainsi la plus petite quantité d’énergie possible. On peut donc supposer que les mêmes conditions (pas de nourriture ni d’eau) chez une personne au moins un peu active, et qui peut transpirer, ne pourraient que conduire à une fin beaucoup plus rapide.

Pour les individus qui aiment s’aventurer dans la nature, et qui à la lecture des récits des mésaventures des autres (Into the Wild, 127 Hours, etc.) ne sont pas du tout découragés de suivre le mouvement (compagnie actuelle incluse), s’assurer de toujours avoir une réserve d’eau raisonnable devrait être la priorité numéro un. En outre, comme le montre bien la disparition éventuelle de Christopher McCandless (Into the Wild), le fait d’éviter de manger des plantes et des arbustes inconnus peut également constituer une stratégie de survie essentielle.

Informations sur le journal : British Medical Journal (BMJ)

Fourni par la Public Library of Science

Cette histoire est republiée avec l’aimable autorisation de PLOS Blogs : blogs.plos.org.

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